Évolution de la matière organique pendant et après la méthanisation

Agronomique

Agronomie

La matière organique évolue sous l’action des microorganismes, dans le digesteur et dans le sol après épandage du digestat. Une partie se dégrade en gaz et une autre partie se réorganise pour former de l’humus.

L’essentiel

La méthanisation provoque la dégradation d’une fraction de la matière organique, généralement entre 40 et 60%, sous la forme de biogaz. La matière organique conservée au cours de ce processus constitue la forme de matière organique la plus stable.

En cas de séparation de phase, la fraction solide concentre en général la majorité des matières organiques. La fraction liquide contient les matières organiques les plus solubles.

A long terme, la matière organique apportée au sol continue à évoluer pour former de l'humus stable.

Pour aller plus loin

Au cours de la méthanisation, une partie des matières biodégradables est convertie en biogaz : entre la moitié et les deux-tiers des protéines, des lipides, de la cellulose et de l'hémicellulose, la quasi totalité de l'amidon. Restent dans le digestat la fraction non dégradée de ces matières, ainsi que les fractions peu biodégradables, notamment la lignine, les lipides complexes et les stéroïdes, molécules précurseuses de l'humus.

La proportion de matière organique restante dépend de la nature des matières entrantes, du temps de séjour, des procédés de prétraitement et de post-traitement. Ces procédés peuvent en effet rendre plus facilement accessibles des matières biodégradables mais entourées de matières réfractaires. C'est le cas par exemple de la paille, où la lignine limite l'accès des microorganismes à la cellulose. Des traitements mécaniques, chimiques ou biologiques peuvent déstructurer ces fibres et rendre les matières biodégradables plus accessibles, augmentant ainsi le taux de conversion en biogaz.

Cette phase de dégradation peut être suivie d’une phase de maturation de la matière. Cette maturation consiste en une réorganisation des composés organiques subsistants en molécules plus complexes qui viendront s’ajouter à l’humus déjà présent dans le sol.

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Matière organique stable

La méthanisation équivaut à "concentrer" la fraction la moins biodégradable de la matière organique. Son ISMO (Indice de Stabilité de la Matière Organique) sera donc plus élevé que celui des substrats initiaux. Cependant le flux de matière organique lentement biodégradable est peu modifié.

L'effet sur la matière organique du sol est similaire à celui obtenu par un épandage direct du substrat, ou après compostage de celui-ci.

Matière organique labile

Une grande partie de la matière organique labile est convertie en biogaz au cours du processus de méthanisation. Les digestats restent cependant biodégradables : leur biodégradibilité résiduelle dépend de la nature des substrats et notamment de leur teneur en molécules peu biodégradables. Elle dépend également du temps de séjour dans le digesteur et du taux d'expression effectif du potentiel méthanogène. Enfin elle dépend des post-traitements éventuels : une étape de compostage du digestat solide par exemple élimine une partie des matières biodégradables.

Ainsi un digestat de lisier de porc est biodégradable à 100% à terme, la raison en étant que les porcs sont nourris avec des aliments très digestibles. La biodégradabilité d'un digestat issu d'un mélange d'effluents d'élevage et de végétaux peut ne pas dépasser 30%.

Devenir à long terme dans les sols

A long terme, le flux de matière organique restitué au sol ne dépend pas du chemin suivi et des différentes opérations successives, il est déterminé uniquement par la composition initiale des substrats.

La part de carbone retenue dans le sol est similaire si les résidus de fourrages ou effluents (avec digestion animale du fourrage) sont incorporés directement dans le sol ou après traitement par méthanisation avec environ 12 à 14 % du carbone initial des végétaux [Thomsen et al, 2013].

Articles liés

 

Sources
Thomsen I.K., Jøreng E.O., Møller H.B. et al., 
Carbon dynamics and retention in soil after anaerobic digestion of dairy cattle feed and faeces
, 2013 , Soil Biology & Biochemistry 58 (2013) 82e87
Møller K., 
Effects of anaerobic digestion on soil carbon and nitrogen turnover, N emissions, and soil biological activity. A review
, 2015 , Kurt Möller. Effects of anaerobic digestion on soil carbon and nitrogen turnover, N emissions, and soil biological activity. A review. Agronomy for Sustainable Development, Springer Verlag/EDP Sciences/INRA, 2015, 35 (3), pp.1021-1041. <10.1007/s13593-015
Bodilis A.-M., Trochard R., Lechat G. et al., 
Impact de l’introduction d’unités de méthanisation à la ferme sur le bilan humique des sols. Analyse sur 10 exploitations agricoles de la région Pays de la Loire
, 2015 , Revue Fourrages (2015) 223, 233-239 239 éditée par l'AFPF (Association Française pour la Production Fourragère)